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LAMINOU ADAMON, UN HOMME PUISSANT, REDOUTABLE ET REDOUTE, UN CONQUERANT NE !

LAMINOU ADAMON
Né en 1897 et est décédé le 18 Février 1983
Origine: Nigérienne
Nationalité : Béninoise
Polygame et père de 46 enfants

INTRODUCTION

Devenu intemporel en pays Wémè, LAMINOU ADAMON fut un personnage incontournable et renommé de la mémoire collective nationale. Chef de Canton Principal à Adjohoun, homme intellectuel, il a gravé dans le marbre, son autorité. Classé parmi l’élite africaine scolarisée du XXe siècle au Bénin, il demeure toujours une référence à Adjohoun, terre chargée d’histoire. Aux générations actuelles, il laisse une image d’homme révolutionnaire et prestigieux. 

Grâce aux exploits réalisés, son nom est, aujourd’hui, associé à la postérité de la famille ADAMON. Sa sagesse et sa carrière uniques ont fait de lui un Chef mythique.

Il ne fait aucun doute que l’histoire de la communauté Wémè ne puisse s’écrire sans celle de Laminou ADAMON. Qu’il s’agisse de sa gouvernance cantonale, de sa relation avec l’administration coloniale, de son sens du jugement ou même de son opulence, il a tout le moins contribué à construire l’imaginaire collectif du Ouémènou. Exploit qui lui vaut toujours sa place dans la mémoire du Pays Wémè. On ne peut que s’accorder sur son charisme et ses qualités de meneur d’hommes ainsi que ses principes et valeurs qui se perpétuent de génération en génération, depuis plus de 50 ans.

ORIGINE ET VIE PRIVEE

LAMINOU ADAMON encore appelé Omoni koyì, est un homme politique et intellectuel béninois.

Il est né en 1897 et est décédé le 18 Février 1983.

Originaire du Nigéria, fils de Wari ADAMON et de Klito AGBAVO, il est musulman. Il a été Chef Canton principal d’Adjohoun et Président des Chefs Canton du Bénin.

Il est polygame et père de 46 enfants.

LAMINOU ADAMON, UN HOMME ENTIEREMENT INSTRUIT.

LAMINOU ADAMON est l’exemple vivant de ce qu’est un homme entièrement instruit. D’abord sous l’arbre à palabres, à l’ombre du baobab, LAMINOU ADAMON fut instruit par son père Wari ADAMON chef de Canton et les notables autour de son père dans ce qu’on peut appeler l’éducation authentique. Cette éducation profondément authentique et endogène dans les valeurs africaines lui donna la capacité au retour de sa formation hors de son milieu d’origine, d’inspirer le respect, d’incarner la vision, la mission, les valeurs et les pratiques d’un véritable chef de terroir.

Ensuite, LAMINOU ADAMON alla à l’école du colon. Là-bas, il apprit leurs langues, leurs valeurs, leurs pratiques, non pas pour abandonner les siennes mais pour les enrichir. Après Porto-Novo où il fit ses études primaires, il alla à Dakar et en France d’où il revint non seulement avec des connaissances livresques, mais aussi, avec des pratiques copiées ci et là, utiles pour asseoir et enrichir sa gouvernance.

Comme Laminou ADAMON, tout enfant, doit acquérir les connaissances de l’école mais aussi son histoire, sa culture et les valeurs endogènes. LAMINOU ADAMON  est l’exemple vivant du pouvoir dans la connaissance plurielle puisqu’il en a tiré une puissance qui le rendit redoutable et redouté même après sa mort.

Lorsque Comlan Bernard POGNON annonça à son père Comlan KATON POGNON lui-même chef Canton, qu’il voulait épouser la fille de Laminou ADAMON, le père lui répondit que s’il aime les problèmes, il est libre d’aller faire ce mariage. Mais que si ce n’était pas le cas, il ferait mieux de vite oublier cette idée. Oh oui, LAMINOU ADAMON était puissant, redoutable et redouté !

LAMINOU ADAMON, UN LEADER ET UN CONQUERANT NE.

Wari ADAMON, en bon chef traditionnel, avait plusieurs épouses et beaucoup d’enfants. Sa succession en tant que chef canton n’était donc pas chose facile et aisée.

Les chances de LAMINOU ADAMON pour succéder à son père étaient donc hypothéquées par son départ pour des études à l’école du colon mais, c’était sans compter avec les compétences avérées de l’homme en matière de leadership. À son retour dans le cercle familial, il devint grâce à ses compétences en Leadership le successeur naturel et légitime de son père.

Le parcours de Laminou ADAMON, peut être comparé à celui d’un grain de café qui, versé dans de l’eau bouillante, fond d’abord, s’adapte à l’environnement et va le conquérir par la suite pour lui imposer son gout, son arome, sa couleur, etc.

LAMINOU ADAMON n’a pas réussi seulement à être le leader en famille, pour succéder à son père. Il était aussi leader remarquable et remarqué par les autres chefs canton, par l’administrateur colonial pour devenir président des chefs Canton du Bénin.

Laminou ADAMON, en plus de ses compétences de leader avait aussi des compétences relationnelles. Il pouvait promouvoir les études et la carrière de ses enfants, de ses gendres, de ses petits-enfants grâce à ses relations tissées par ci, par là.

Considéré comme un pionnier dans la commune d’Adjohoun, LAMINOU ADAMON fut un homme qui de par son parcours, son charisme et son influence, a marqué l’esprit de toute une communauté.

Figure emblématique de la vallée de l’Ouémé, doté d’un Leadership d’impact, d’une autorité naturelle,  LAMINOU ADAMON fut un homme dont le parcours peut être enseigné dans les écoles de stratégies. Il devint successivement, chef de canton (plusieurs de ses  frères convoitait le poste), chef de canton principal (titre réservé à des chefs de Canton Émérite), et Président des chefs de canton du Bénin.  Son règne et son autorité durèrent de 1918 jusqu’à sa mort.

LAMINOU ADAMON était politiquement incontournable dans la vallée de l’Ouémé et même au-delà. Puissant métaphysiquement, il l’était aussi politiquement. Interlocuteur incontournable de l’administration coloniale, il l’était aussi pour tout homme politique voulant conquérir la vallée de l’Ouémé et ses environs.

LAMINOU ADAMON : UN HOMME ELOQUENT, ELEGANT, AMI DU PEUPLE ET DE LA NATURE.

Homme lettré, esprit éclairé, c’était le chef au discours solennel et éloquent. Grand de taille et souvent bien drapé dans sa tenue traditionnelle et parfois en tenue française, il dégageait une certaine élégance. Fin amoureux de la nature, il passait souvent ses week-ends dans ses nombreuses plantations. Chef coutumier de première importance, LAMINOU ADAMON était un descendant direct des fondateurs de la vallée de l’Ouémé encore appelé « pays Ouémé ». Cette noblesse familiale lui vaudra la déférence de la population. ‘’ César ‘’ pour certains,  ‘’ Pacha pour d’autres ‘’, LAMINOU ADAMON avait tout de même grande allure. Deuxième et dernier chef de canton, LAMINOU ADAMON a apporté une immense contribution au développement social, économique et culturel d’Adjohoun.

Il fût élevé au grade de Chevalier de l’Ordre National du Dahomey suite à un décret présidentiel du Président Hubert MAGA le 29 juillet 1961.

Grand voyageur et homme ambitieux, LAMINOU ADAMON eut édifié une imposante maison de type colonial dans son fief natal à Adjohoun, maison que ses enfants ont entièrement réhabilité et modernisé.

Certaines personnes ayant encore des souvenirs de son vécu pourraient douter du fait qu’il était l’ami du peuple. Puisque de son temps, Laminou ADAMON se déplaçait en permanence avec son repas et ses boissons.

Dans certaines contrés, refuser le repas de ses hôtes est considéré comme un affront et pourtant il le faisait et certainement à raison. Dans son livre intitulé De l’Afrique au Louvre, Emile DIALINI explique que La tradition du poison a fait d’Abomey une capitale florentine, et les féticheurs de toute la région étaient experts en empoisonnements indécelables, au point que toute mort sans cause notoire était immanquablement suspectée.

Les divers empoisonnements n’étant pas forcément fait pour nuire mais certains considéraient qu’ils ne faisaient que justice en se servant d’une méthode peu orthodoxe.

Une rumeur dit que le fils du Roi BEHANZIN ayant ramené sa dépouille devait en réalité être inhumé avec son père. Il réussit à y échapper mais deux jours après son retour chez lui, il fut pris de douleurs au ventre, et dut être emmené à l’hôpital où il mourut dans d’atroces souffrances. Certains disent que les anciens ont fait respecter la tradition.

ADAMON Laminou avait donc en quelque sorte raison de se déplacer avec ce qui entre dans son ventre, dans de telles circonstances.

Une anecdote pour montrer à quel point c’était aussi un homme drôle en dépit de toute sa grandeur et toute sa puissance.

Quand il rendait visite à son beau-fils, Feu Bernard Comlan POGNON, époux de sa fille Augustine Ananatou ADAMON, il lui demandait de lui offrir à boire. Ce dernier enthousiaste à l’idée de servir son beau-père se précipitait pour aller chercher des boissons. Et là il lui disait qu’il lui était impossible de boire une boisson ouverte en son absence.

Son beau-fils décida donc de lui en acheter une intacte qu’on ouvrirait devant lui. Et là, il rétorquait qu’il en a dans sa voiture donc qu’il allait la lui vendre. Qui pourrait dire non à son beau-père, qui plus est le grand Laminou ADAMON ? Le beau-fils se résigna donc et lui remit l’argent pour la boisson. Au moment d’ouvrir la fameuse bouteille, il refusa soit disant qu’il n’avait plus soif et comme c’était la sienne désormais, il rentrerait avec.

Va savoir combien de personnes ont payé pour cette même boisson et combien de fois. 

LAMINOU ADAMON, UN HOTE DISTINGUE

Connu pour ses grandes réceptions, Laminou ADAMON avait du tact quand il s’agissait d’organiser les cérémonies officielles et traditionnelles. Champagne, bière, eau Perrier, rien ne manquait à ses nombreuses fêtes raffinées. Ce qui fit de lui, l’un des rares chefs à recevoir les personnalités de l’administration coloniale qui passaient par Porto-Novo.

Rare sont les autorités qui passait par Porto Novo sans s’arrêter chez Laminou ADAMON.

C’est ainsi qu’un jour, Emile DIASSINI, un administrateur civil et homme politique français, dans sa quête d’enrichir au maximum sa carrière coloniale d’administrateur de la France d’outre-mer, il fait un long voyage au Bénin. C’est dans ce voyage fait-en ……… qu’il eut l’occasion d’aller à la rencontre du grand Laminou ADAMON et d’assister à l’une de ses merveilleuses cérémonies comme il l’a décrite dans son ouvrage, Grands travaux: de l’Afrique au Louvre.

Emile DIASSINI raconte donc dans ce livre sa rencontre avec LAMINOU ADAMON en ces termes.

Je devais rencontrer un chef coutumier de première importance, Adamon Laminou, président de l’Association des Chefs du Territoire. Il était le descendant direct des premiers chefs Ouéménou, fondateurs d’Adjohoun. Majestueux, solennel, Laminou avait grande allure, et ses réceptions étaient fameuses, au point qu’on lui envoyait toutes les personnalités qui passaient par Porto-Novo : il en était fier.

Sa fierté faisait plaisir à voir quand il déployait fastueusement les attributs de sa charge en l’honneur de ses visiteurs. Aucune réception n’était plus belle que les siennes, même chez les rois d’Abomey, et celle de ma prise de commandement est restée dans ma mémoire.

Très grand, il avait revêtu sur un pagne chamarré une longue redingote de velours noirs passementée d’or, comme son bicorne emplumé. 

Sous son parasol multicolore, il s’avança à ma rencontre escorté de ses recadères et suivi par sa vingtaine de femmes uniformément habillées d’un même pagne, chantant et se trémoussant en cadence au rythme assourdissant des tam-tams et des gongons.

Subitement, il se figea et cria un ordre qui mit quelques secondes pour arriver au Tam-tamier la plus éloigné. Ce fut alors, après tout ce bruit, un silence prodigieux, très vite rompu par le nouvel air joué par les musiciens principaux : je ne reconnus pas d’emblée la Marseillaise dans cette orchestration insolite pour tam-tam ouéménou. La foule s’était immobilisée alors que je poursuivais ma marche.

Les anciens combattants alignés, présentant des armes avec un fusil de bois : ils étaient nombreux dans la circonscription, et Laminou avait l’habileté de les traiter avec considération, et de les utiliser comme une garde prétorienne, payée les jours de fête en coups de sodabi.

Après ce moment solennel, le vacarme revint peu à peu, puis les danses, et enfin le désordre chaleureux.

Laminou ADAMON avait le don de faire les choses en grand et de traiter ses invités avec respect et honneur.

LAMINOU ADAMON, UN PATERNEL ET CHEF DE FAMILLE AUX PETITS SOINS

Père et Chef de famille protecteur, LAMINOU ADAMON n’a eu de cesse d’éduquer ses enfants, nonobstant leur nombre pléthorique. Il n’était pas qu’un homme du peuple. Il veillait également sur ses enfants et ses femmes.

Parfois en réunion, sous l’arbre à palabres, avec toute sa famille à Adjohoun, il s’essayait, tant bien que mal, de garantir à ses enfants un avenir meilleur.

Durant plus de huit décennies d’existence, il ne s’est pas lassé de transmettre des qualités de rigueur, de ponctualité et d’organisation à ses enfants.

Il est courant d’entendre ci et là que les africains à l’origine ne respectait pas les femmes. Cette impression devient plus accentuée lorsqu’il s’agit de chefs traditionnelles. LAMINOU ADAMON était bel et bien un chef traditionnel, il l’était déjà dans sa tête et dans son esprit en grandissant puisque fils de chef Canton, il l’est devenu aussi. Cela se confirme par la pluralité de ses femmes et de ses enfants. On pouvait donc s’attendre aisément à voir un LAMINOU ADAMON qui n’a aucun respect pour la femme.

Seulement, ADAMON Laminou, bien qu’étant Musulman et fière de l’être, a permis à une de ses épouses de ne pas devenir musulmane, d’exiger et obtenir que ses enfants à elle soient catholiques, de poursuivre ses études, sa carrière, d’habiter chez elle et pas dans le domicile conjugal, bref autant de choses qui montrent combien LAMINOU ADAMON respectait la femme et permettait à la femme d’exister, de s’épanouir, de se réaliser. 

LA LEGENDE ADAMON LAMINOU

Des sources historiques racontent que LAMINOU ADAMON avait la faculté d’influer sur l’avenir par la parole. Il faisait également preuve d’une assurance inébranlable.

L’histoire se déroule au Bénin, à Adjohoun en 1954. La veille du mariage de l’une de ses filles, Honorine Fatima ADAMON, la pluie se mit à tomber en torrents enlevant toitures. Il dit à sa fille << Si le lendemain, le jour de ton mariage, il y a une goutte de pluie, je renie mon nom >>. Le lendemain, le soleil se leva tôt, et elle put faire le mariage civil et religieux, le même jour. Ce fut une grande fête qui a connu la descente des administrateurs coloniaux et la publication dans les journaux officiels.

Comme si cela ne suffisait pas, en 1980, il dit à l’une de ses petites-filles, Mme Gisèle HOUNNOU épouse TOUTCHE, Sage-femme d’État, << Tu réussiras à n’importe quel concours que tu passeras >>. Elle suivit alors le conseil de son grand père et réussit effectivement aux concours des sages-femmes, infirmiers-infirmières, aide assistante sociale et des agents d’exploitation de l’OPT. Autant dire que LAMINOU ADAMON avait déjà compris l’utilisation des paroles transformatrices depuis des lustres.

Un jour, une autorité du Bénin, soutenu par un notable de la ville, voulait insulter le petit-fils de LAMINOU ADAMON en faisant un commentaire désagréable sur ce dernier.

L’un et l’autre (l’autorité et le notable) étaient originaires du canton dont LAMINOU ADAMON était le dernier Chef. Le petit-fils de LAMINOU ADAMON pensait que la puissance de son grand-père était du passé et leur répondit « Si LAMINOU ADAMON était vivant, vous seriez morts pour avoir osé prononcer son nom sans respect ». Quelques semaines plus tard, l’autorité et le notable furent paralysés et moururent. LAMINOU ADAMON est et demeure puissant redoutable et redouté même après sa mort.

Au regard des temps, il est primordial de mettre l’accent sur un pan de l’histoire qui a marqué, à jamais, le Bénin, plus précisément, la communauté Wémè. D’une ambition sans bornes, LAMINOU ADAMON dirigea avec ferveur l’ex canton d’Adjohoun. Son influence et sa toute-puissance perdurent toujours en pays Wémè. Si l’on prend en compte sa détermination, son leadership et sa bravoure, on peut aisément dire qu’il est, aujourd’hui, un conquérant né, un homme redoutable et redouté, un leader exceptionnel, doté d’une capacité relationnelle hors norme.

REFERENCES  

  • Mme Gisèle TOUTCHE épouse HOUNNOU, Sage-femme d’Etat
  • Canton (division administrative), WIKIPEDIA
  • La naissance et l’évolution du royaume de Wémè, LE DÉVELOPPEMENT DE LA VALLÉE NOUS PRÉOCCUPE
  • Destination Bénin : ADJOHOUN, vivier culturel et cultuel au cœur de l’Ouémé ; Site du Gouvernement de la république du Benin